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ELISABETH MONTEIRO RODRIGUES
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Vous n'avez jamais lu un texte comme celui-là !
Une vieille dame enregistre sur un petit magnétophone le journal d'une année de vie en maison de retraite. Sa fille, l'écrivaine Lídia Jorge, retranscrit les textes et leur rend leur force littéraire en suivant les pas de ce personnage extraordinaire qui a gardé une mémoire intacte, une imagination fertile, une curiosité pour les autres et une attention réelle à la beauté du monde, en dialoguant avec la mort comme avec un adversaire légitime.
Ce texte constitue un condensé incroyable de force vitale, de dérision, de révolte et de foi dans la vie. Avec des instants mémorables de la relation entre une mère et sa fille. Tout cela transforme ce récit en un témoignage admirable sur la condition humaine.
Misericordia est une véritable prouesse littéraire. Un récit à la fois brutal, ironique et aimable, un mélange de larmes et de rires qu'on n'oublie pas. Il nous montre une femme exceptionnelle portée par l'immortalité de l'espoir. -
Quand Raquel commence à raconter son histoire, Pardalita est déjà là.
Elle est entrée dans sa vie sans fracas, avec douceur et subtilité.
Raquel connaît Pardalita de vue, mais elle attend avec impatience ces moments où elle la croise par hasard, dans les couloirs du lycée, puis aux répétitions du groupe de théâtre. Chaque fois, Raquel tente
de capturer un détail qui lui appartient, comme cette étiquette qui s'obstine à dépasser de son pull pour lui caresser la nuque.
Et elle s'interroge : « À quelle distance minimale doit-on se tenir de quelqu'un sans laisser entendre qu'on ne voudrait pas de distance du tout ? »
Entre roman graphique, bande dessinée et journal intime, Joana Estrela signe un roman unique en son genre. -
En 2019, un cyclone a entièrement détruit la ville de Beira sur la côte du Mozambique.
Un poète est invité par l'université de la ville quelques jours avant la catastrophe. Il retrouve son enfance et son adolescence dans ces rues où il a vécu dans les années 70. Il va faire un voyage «vers le centre de son âme» et y trouver son père, un grand poète engagé dans la lutte contre la colonisation portugaise. Il se souvient des voyages sur le lieu de terribles massacres perpétrés par les troupes coloniales. Il se souvient aussi de Benedito, le petit serviteur, aujourd'hui dirigeant du FRELIMO au pouvoir, de l'inspecteur de la police politique, des amoureux qui se sont suicidés parce que leur différence de couleur de peau était inacceptable, de la puissante Maniara, sorcière et photographe, et surtout de Sandro, son frère caché.
Les faits que l'enfant qu'il fut nous raconte sont terribles, le racisme, la bêtise coloniale, la police politique, la PIDE, les traîtrises.
Ce roman au souffle puissant peuplé de personnages extraordinaires à l'intrigue aussi rigoureuse que surprenante est écrit comme la poésie, que Mia Couto définit comme «une façon de regarder le monde et de comprendre ce qui habite une dimension invisible de ce qu'on nomme la réalité. Sans cette dimension poétique il est impossible de comprendre la vie».
Un roman magnifique, dans l'ombre d'un cataclysme, le plus personnel écrit par l'auteur, l'un de ses meilleurs. -
Un voyage poétique au pays de l'enfance en compagnie de Mia Couto, auteur dont la langue n'a de cesse de réunir les mondes, les temps et les êtres.
Traducteur de pluies est le premier recueil de poésie de Mia Couto publié en français. C'est peu dire que la poésie est fondamentale pour l'auteur qui se considère avant tout comme un poète. Le territoire de l'enfance associée à la maison familiale, à son quartier est évoqué avec tendresse, il est le temps heureux de tous les commencements. Désormais révolu, il est propice à la mélancolie et suscite la saudade chez le poète. Ce recueil trace comme un cycle de la vie, des éléments, des saisons, de la naissance à la mort. C'est un condensé du regard doux, juste et toujours onirique que l'auteur, que l'on ne présente désormais plus, porte sur la vie et partage avec générosité. Un très beau recueil pour continuer (ou commencer) l'exploration de l'oeuvre de Mia Couto. -
Publié par Albin Michel en 1994 et épuisé aujourd'hui depuis de nombreuses années, ce premier roman de Mia Couto a surpris par sa créativité littéraire due au mélange de la langue portugaise avec les nombreuses langues mozambicaines. Il a été traduit à l'époque par Maryvonne Lapouge dans un français classique.
Aujourd'hui il est traduit par Elisabeth Monteiro Rodrigues dont l'inventivité linguistique, qui a fait le succès des romans récents de Mia Couto, lui rend fidèlement la beauté surprenante de son style et son foisonnement linguistique africain pour nous faire redécouvrir un roman brillant.
Sur une route déserte, un vieil homme et un enfant marchent, épuisés. Alentour, un Mozambique déchiré entre troupes régulières et bandes armées. Devant eux, un autobus, ou ce qu'il en reste : tôles incendiées, corps pêle-mêle ; un asile, pourtant, où le vieillard et l'enfant vont faire halte et découvrir, miraculeusement intacts, les cahiers d'un certain Kindzu. Le récit de cet homme parti vers l'inconnu et l'aventure pour renouer avec l'esprit des sorciers et des guerriers sacrés leur livrera peu à peu la clé de leur destin.
Épopée fascinante et douloureuse d'un peuple en proie à la guerre civile, qui survit enraciné dans ses traditions et ses mythes plus forts que toute réalité barbare, cette oeuvre magique puise dans l'imaginaire africain et rejoint, par la beauté surprenante de son style, la grande tradition des romanciers de langue portugaise, de João Guimarães Rosa à José Saramago. -
« La première fois que j'ai vu une femme j'avais onze ans et je me suis trouvé soudainement si désarmé que j'ai fondu en larmes. Je vivais dans un désert habité uniquement par cinq hommes. Mon père avait donné un nom à ce coin perdu : Jésusalem. C'était cette terre-là où Jésus devrait se décrucifier. Et point, final.
Mon vieux, Silvestre Vitalício, nous avait expliqué que c'en était fini du monde et que nous étions les derniers survivants. Après l'horizon ne figuraient plus que des territoires sans vie qu'il appelait vaguement «l'Autre-Côté». »
Dans la réserve de chasse isolée, au coeur d'un Mozambique dévasté par les guerres, le monde de Mwanito, l'accordeur de silences, né pour se taire, va voler en éclats avec l'arrivée d'une femme inconnue qui mettra Silvestre, le maître de ce monde désolé, en face de sa culpabilité.
Mia Couto, admirateur du Brésilien Guimarães Rosa, tire de la langue du Mozambique, belle, tragique, drôle, énigmatique, tout son pouvoir de création d'un univers littéraire plein d'invention, de poésie et d'ironie. -
Tombe tombe au fond de l'eau
Mia Couto
- Chandeigne
- Bibliotheque Lusitane
- 7 Février 2025
- 9782367322865
Une histoire d'amour secrète et interdite révélée par un dialogue bouleversant de délicatesse...
Au Mozambique, au bord de l'océan indien: Zeca Perpétuo, un ancien pêcheur, n'a d'yeux que pour sa voisine, Dona Luarmina qui passe le plus clair de son temps à effeuiller des fleurs invisibles. Leurs rencontres, à la fois cocasses et poignantes empruntent souvent des voies étranges. Ils en viennent à délivrer de lourds secrets. Iront-ils jusqu'au bout de leur dialogue alors que leur existence, déjà précaire, sombre inexorablement ? -
À Senaller, un village dont on ne peut que partir, la pluie ne tombe plus, elle demeure en suspens. Le fleuve est à sec, la sécheresse menace. Le village est-il la proie d'un châtiment divin ou des rejets de l'usine installée à proximité ? Devant l'impuissance des commandeurs des nuages et des villageois, la mère du narrateur décide de se rendre à l'usine... Devenu le complice malgré lui d'un terrible secret, l'enfant n'a pas d'autre choix que de protéger sa mère de la fureur paternelle. La présence aimante du grand-père est l'unique refuge de l'enfant. Afin que la pluie tombe à nouveau, la famille devra dérouler les fils de son histoire et revivre la légende des Ntoweni.
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Le chasseur d'éléphants invisibles
Mia Couto
- Editions Chandeigne&Lima
- Lusitane
- 20 Janvier 2023
- 9782367322438
Si la toile de fond touche à l'actualité, la plume, elle, est toujours aussi poétique. L'auteur interroge les enjeux des sociétés contemporaines post-coloniales en posant les termes d'un dialogue entre leurs différentes composantes. Chaque parole, chaque être, chaque contexte est pris en considération. Au fil des nouvelles, se dévoile alors la complexité du Mozambique contemporain. Un pays monde, un pays de décalages.
Avec tendresse et sensibilité, les singularités de chacun mises en exergue servent finalement à montrer not -
En allant chercher son petit-fils Henrique à l'école, Abílio apprend qu'il s'est fait renverser par une voiture et qu'il se trouve aux urgences. Rogério et Marta, ses parents, attendent des nouvelles dans le hall. Autisme est le récit de cette attente hallucinée dans l'univers clos des urgences, entrecoupé de scènes - souvent au vitriol - de la vie quotidienne.
Avec une ironie mordante et un humour décapant, Valério Romão dissèque ses personnages au microscope et orchestre leurs voix tumultueuses par des dialogues incantatoires. Les phrases longues tissent entre eux flux de pensée et dialogues avec un travail sur la langue à la fois soutenu et très oral. Roman polyphonique, ce roman coup de poing se clôt par une magnifique Lettre au père. -
Les sables de l'empereur
Mia Couto
- Editions Métailié
- Bibliotheque Portugaise
- 9 Janvier 2020
- 9791022609876
À la fin du xixe siècle, le Mozambique est ravagé par les guerres de clans et contre les colonisateurs.
Deux personnages de fiction, Germano, un soldat portugais exilé sans espoir de retour parce que républicain, et Imani, une jeune Africaine, trop belle et trop intelligente, son interprète, sont le fil rouge de ce roman où ils évoluent parmi des personnages historiques biens réels, comme l'empereur africain Ngungunyane et le flamboyant Mouzinho de Albuquerque, « pacificateur » du Mozambique.
La puissance coloniale portugaise se heurte à Ngungunyane, en une valse-hésitation pilotée depuis Lisbonne. Germano découvre l'Afrique de l'Est en prenant son poste dans un village perdu. Sa mission est totalement vide de sens. Là, il fait la connaissance d'Imani. Dans ses rapports à sa hiérarchie, Germano raconte les transformations de la région mais surtout de son âme avec en toile de fond l'affrontement entre la monarchie coloniale et Ngungunyane ainsi que les guerres entre clans africains. Imani raconte les changements des destins et du pays. Elle décrit l'avancée de la colonisation, les structures familiales, les traditions qui cherchent à subsister, les migrations. Elle s'aperçoit aussi que ce qui la distingue, sa maîtrise du portugais, la sépare de ses voisins qui la voient différente, trop loin d'eux, tandis que les Portugais la considèrent trop proche. Liés par un amour ambigu, Imani et Germano partent sur le fleuve dans une itinérance chaotique et aventureuse qui les confronte à la réalité de la guerre. Ngungunyane, vaincu et humilié, est embarqué avec une partie de sa cour, dont Imani enceinte, vers Lisbonne puis exilé aux Açores.
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De vibrants portraits de femmes aux prises avec leurs désirs, leurs amours déçues et leurs blessures assassines, des êtres qui réinventent le réel, des enfants qui revisitent leurs rêves : telles sont les perles de verre (missangas) qui composent cette oeuvre où Mia Couto invente un univers singulier et un langage unique, africain et universel. Mêlant harmonieusement registres littéraires et populaires, jeux de mots et mots-valises, ces nouvelles lapidaires tantôt cruelles, tantôt drolatiques, incarnent ici l'art du conte porté à sa perfection. Mia Couto, né en 1955 au Mozambique, s'affirme de livre en livre comme le plus inventif et le plus fascinant des écrivains de langue portugaise.
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25 avril 1974. Au Portugal, c'est la Révolution des Oeillets. Tombe la dictature de Salazar, surgit la démocratie. Ce même jour, dans un petit village isolé au centre du pays, Celestino, armé de son fusil, disparaît... Quand on le retrouve, il est mort. Débarqué il y a plus de quarante ans dans cette zone rurale, comme sorti de nulle part, il s'était bien intégré mais demeurait auréolé de mystère. Le lecteur fasciné décrypte au fil des pages l'histoire de l'étrange bonhomme en même temps que celle de la famille de son ami, le docteur Auguto Mendes, et cela sur trois générations profondément marquées par le salazarisme et les guerres coloniales. Chacune des figures qui hantent ce roman étourdi de musique et de violence apprend irrésistiblement que les secrets et les mystères du passé traversent le temps... Qu'est-il arrivé à Celestino ? Pourquoi et comment la rencontre de la petite et de la grande histoire fait-elle émerger un passé enfoui dont les répercussions résonnent comme le destin ? La Main de Joseph Castorp foisonne d'histoires, de scènes insolites, de personnages fantasques et tragiques. L'ironie, l'humour, sans oublier la tendresse, caractérisent la belle entrée en littérature de João Ricardo Pedro. [Lire l'article sur ce roman paru dans Page des Libraires->http : //www.pagedeslibraires.fr/livre-3993/la-main-de-joseph-castorp.html] et [écouter le coup de coeur d'un libraire sur France Culture->http : //www.franceculture.fr/player/reecouter ?play=4711110].
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Maintenant et à l'heure de notre mort
Susana Moreira Marques
- Editions Do
- 14 Novembre 2019
- 9791095434214
En 2009, au Portugal, la Fondation Calouste Gulbenkian a mis en place un programme de soins palliatifs à domicile sur le plateau mirandais, dans la région de Trás-os- Montes. De village en village, une médecin, des infirmiers et d'autres professionnels de santé ont aidé des dizaines de malades, d'âges, de milieux sociaux et de contextes familiaux différents, à traverser leur fin de vie dans le plus grand confort possible, et à mourir chez eux accompagnés. La rencontre de Susana Moreira Marques avec ce projet et de nombreuses visites, entre juin et octobre 2011, ont abouti à l'élaboration de ce livre, composé en deux parties : Notes de voyage sur la mort, texte en prose, fragmentaire, aux accents poétiques et philosophiques, qui compose une réflexion, à la fois intime et universelle, sur la fin de vie ; Portraits, de celles et ceux qui vont mourir bientôt, ou de celles et ceux qui les accompagnent, et qui se souviennent de ce que fut leur vie.
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Comme dans le Fil des missangas, Chandeigne 2010, Histoires rêvérées, de très courtes nouvelles dressent le tableau d'une humanité vent debout. Un grand-père enseigne à son petit-fils à voir l'ailleurs. Une petite fille, ne pouvant se résoudre à abandonner son père au milieu des bombes, se transforme en fleur. Un aveugle, dont le guide est mort à la guerre, nous montre le chemin. Le vieux Felizbento qui, en pleine guerre, refuse de quitter sa maison et qui ne partira qu'à condition d'emmener tous les arbres. Un enfant victime de la barbarie militaire. Le buveur du temps. Une noix de coco pleure et saigne, un hippopotame, dont un dit qu'il serait un trépassé, détruit un centre d'alphabétisation. La guerre des clowns ou comment deux clowns vont semant la guerre de ville en ville... et bien d'autres histoires qui font du rêve le lieu de résistance ultime face aux ravages de la guerre. « Ces histoires parlent de ce territoire dans lequel nous nous reconstruisons et mouillons d'espoir le visage de la pluie, eau rêvérée. De ce territoire dans lequel tous les hommes sont égaux, ainsi : feignant d'être là, rêvant de partir, inventant de revenir » écrit Mia Couto en introduction à ce recueil. Publié en 1994, c'est un recueil fondamental dans la genèse de l'oeuvre de Mia Couto, de son écriture si souvent commentée et de sa filiation avec João Guimarães Rosa. Les néologismes, les idiomatismes, les proverbes détournés, les jeux de mots font ici florès. Autant de singularités que la traduction tente de restituer par des archaïsmes, en détournant l'emploi sémantique ou grammatical des mots, en créant des mots composés ou des néologismes (par la préfixation, suffixation, mots valises et fusion de deux mots), afin de faire entendre le bruissement de la langue.
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Tizangara, village imaginaire du Mozambique, est le théâtre d'événements délirants. Les casques bleus, venus surveiller le processus de paix après la fin de la guerre civile, explosent sans laisser de traces, si ce n'est celle de leur membre viril. Massimo Risi, inspecteur italien des Nations Unies, est dépêché sur les lieux pour élucider ces morts mystérieuses.
Accompagné d'un traducteur, il arpente Tizangara à la recherche d'indices.Ana Deusqueira la prostituée, Sulplício le père du narrateur, Temporina la jeune ensorcelée, le prêtre Muhando, le sorcier Zeca Andorinho et Estêvão Jonas l'administrateur corrompu du village sont les personnages bigarrés de cette farce à la fois grotesque et tragique.
Mia Couto dépeint avec un humour décapant l'histoire du Mozambique contemporain, de l'immense espoir suscité par l'indépendance et la confiscation du pouvoir par les héros d'hier à la période qui a suivi la fin de la guerre civile sous le regard complice de la communauté internationale. Fable du chaos, Le dernier vol du flamant s'élève contre les vies brisées par le fracas des guerres et l'indigence des gouvernants.
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Un père fait revivre sa défunte épouse à travers son fils aîné qui se métamorphose de jour en jour. Un autre grossit outre-mesure sous les yeux à la fois émerveillés et terrifiés de sa femme et ses enfants. Un jeune homme au terrible destin s'interroge sur la profondeur des ténèbres qui l'assaillent. Une famille se retrouve démunie face à l'inondation et survit grâce à l'aïeul, prodige amphibien... Dans ces onze nouvelles oscillant entre le tragique et le fantastique, l'intimiste et le pathétique, le merveilleux et l'horreur, Valério Romão, auteur remarqué du prodigieux Autisme (finaliste du prix Femina étranger 2016), poursuit avec brio son exploration de la complexité de la nature humaine. À l'instar de ce chirurgien pronostiquant à travers le rétroviseur de son taxi, il ausculte d'une plume implacable et jubilatoire l'essence même des structures familiales qui tantôt enferme et aliène, tantôt exalte et sublime les passions humaines. La famille est un abîme dont on n'échappe que très difficilement, et bien souvent à nos risques et périls. Une lecture foudroyante et thérapeutique, dévoilant toute la violence des relations familiales et intimes qui existe en chacun de nous.
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Un homme assis sur un banc de désespérance devant le Palais regarde la mer tandis que les mercedes et les gueules de crapauds vont et viennent. Tous les dimanches, des enfants se réunissent dans une maison au bord de la mer pour écouter le Camarade Commandant et l'histoire de la montre qui navigue dans la bouche des petits comme un bateau de musique sur une mer d'arc-en-ciel infini. Mana Domingas, la tenancière du dernier bordel de Luanda, se cramponne à son crochet tandis que des soldats dévastent sa maison. Deux reines mènent la foule à travers Luanda en liesse. Carlota, l'enfant pionnier et son ami chien Bazuka attendent la fin des bombardements dans une conduite d'égout où perce un rayon de lune. Nous sommes en 1975, l'Angola devient indépendante le 11 novembre 1975. À Luanda, les différents mouvements en lutte pour l'indépendance se livrent une véritable guérilla urbaine. Écrites dans le feu de l'action - l'auteur a joué un rôle clé dans les événements -, ces nouvelles sont autant d'instantanés pris sur le vif et dressent le portrait de camarades : ces hommes, ces femmes et ces enfants pionniers au fusil de fronde et de balle qui jouent à la guerre qui fait rage sous leurs yeux.
L'écriture fait écho à la liesse de tout un peuple. Mue par l'urgence de dire et de crier, elle jaillit traversée d'humour et de tendresse. Elle déploie avec lyrisme et par moments, comme dans une litanie, ce moment historique dans lequel la vie de tout un peuple bascule. La révolution c'est comme la bicyclette, si elle s'arrête, elle tombe.
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Poisons de Dieu, remèdes du Diable
Mia Couto
- Editions Métailié
- Bibliotheque Portugaise
- 10 Janvier 2013
- 9782864248958
Sidónio Rosa est tombé éperdument amoureux de Deolinda, une jeune Mozambicaine, au cours d'un congrès médical à Lisbonne, ils se sont aimés puis elle est repartie chez elle. Il part à sa recherche et s'installe comme coopérant à Villa Cacimba. Il y rencontre les parents de sa bien-aimée, entame des relations ambiguës avec son père et attend patiemment qu'elle revienne de son stage. Mais reviendra-t-elle un jour ?
Là, dans la brume qui envahit paysage et âmes, il découvre les secrets et les mystères de la petite ville, la famille des Sozihno, Munda et Bartolomeo, le vieux marin. L'Administrateur et sa Petite Épouse, la messagère mystérieuse à la robe grise qui répand les fleurs de l'oubli. Les femmes désirantes et abandonnées. L'absence dont on ne guérit jamais.
Un roman au charme inquiétant écrit dans une langue unique.
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«Et si ça se trouve, il y en a qui ont peur que la peur prenne fin».
En mai 2011, Mia Couto a été invité aux Conférences d'Estoril (Lisbonne), dont le but est de susciter des débats internationaux sur les défis de la globalisation.Seul homme de lettres invité, Mia Couto intervient en lisantun texte sur l'instrumentalisation la peur. Cette conférence était contemporaine de l'intervention d 'une force armée internationale en Lybie.
C'est ce texte bref, fort, lucide et plus que jamais d'actualité que nous donnons ici en version bilingue.
« La peur a été en définitive le maître qui m'a fait le plus désapprendre. Lorsque j'ai quitté ma maison natale, une main invisible m'ôtait le courage de vivre et l'audace d'être moi-même. À l'horizon, il y avait davantage de murs que de routes. À cette époque, j'entrevoyais déjà une autre vérité : il existe en ce monde plus de peur des mauvaises choses que de mauvaises choses à proprement parler. [...] »
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La confession de la lionne
Mia Couto
- Editions Métailié
- Bibliotheque Portugaise
- 22 Janvier 2015
- 9791022601474
Lorsque le chasseur Arcanjo Baleiro arrive à Kulumani pour tuer les lions mangeurs d'hommes qui ravagent la région, il se trouve pris dans des relations complexes et énigmatiques, où se mêlent faits, légendes et mythes. Une jeune femme du village, Mariamar, a sa théorie sur l'origine et la nature des attaques des bêtes. Sa soeur, Silência, en a été la dernière victime. L'aventure est racontée par ces deux voix, le chasseur et la jeune fille, au fil des pages on découvre leurs histoires respectives. La rencontre avec les bêtes sauvages amène tous les personnages à se confronter avec eux-mêmes, avec leurs fantasmes et leurs fautes. La crise met à nu les contradictions de la communauté, les rapports de pouvoir, tout autant que la force, parfois libératrice, parfois oppressive, de leurs traditions et de leurs croyances. L'auteur a vécu cette situation de très près lors d'un de ses chantiers. Ses fréquentes visites sur le théâtre du drame lui ont suggéré l'histoire inspirée de faits et de personnages réels qu'il rapporte ici. Clair, rapide, déconcertant, Mia Couto montre à travers ses personnages forts et complexes la domination impitoyable sur les femmes, la misère des hommes, la dureté de la pénurie et des paysages. Un grand roman dans la lignée de L'Accordeur de silences.